Virginie Queyrel et sa jument espagnole Guapa.
Toutes deux sont mes élèves depuis environ une année, à raison de 3 stages de 3 jours.

 

Le cavalier qui souhaitait monter à cheval, il y a encore quelques décennies, trouvait dans tous les cours proposés, des exercices variés sur le travail de la position car elle était une priorité dans l’ordre d’apprentissage pour acquérir un bon équilibre, de l’aisance, de la confiance en soi ainsi qu’une réelle indépendance des aides, condition sine qua none pour accéder à une belle équitation.
Depuis des siècles, les plus anciens maîtres comme les plus récents (Nuno Oliveira entre autre, l’a décrit de nombreuses fois dans ces différentes œuvres), citent le positionnement à cheval comme la fondation de tout acte équestre.

Ces cavaliers, à l’époque, n’étaient pas surpris de la condition physique nécessaire pour cette pratique ainsi que de l’implication constante de cet art si complet et si complexe qu’est celui de l’équitation. Certes, la pédagogie y était plutôt directive, voire coercitive, quelque fois sévère, les dos des chevaux subissaient cet entraînement, mais on pouvait lui reconnaître une certaine et néanmoins, sélective, efficacité.

Ayant évolué à cheval sous cet enseignement, j’ai pratiqué durant mes dix premières années, une équitation sans selle, dite « à cru » où la seule notion de sécurité était celle que l’on avait acquise par le développement de notre propre équilibre.
La chute n’était pas prohibée, elle était même obligatoire car j’entends encore tout au long de ces années « que pour être un bon cavalier, il fallait tomber au moins une centaine de fois ».
Les sorties en extérieur, en plein hiver, avec des poneys enfermés dans des stalles tout au long de l’année, faisait partie du challenge de la gestion de notre assiette à cheval car le gagnant était celui qui ne tomberai point…

C’était ainsi… quel que soit notre avis, les cavaliers en sortaient endurcis, stables et confiants.

Lorsqu’à mon tour, j’ai commencé à enseigner l’équitation, le travail sur la posture du cavalier était donc un principe de base évident avant d’accéder à une réelle technique équestre. Mais je ne me serais aucunement doutée, à l’époque, de la précision et de l’implication qu’exigeait cet enseignement postural…
Certes, des connaissances anatomiques humaines et équines sont essentielles, mais cela va beaucoup plus loin que de simples principes…
La problématique permanente est celle d’oublier que l’équilibre de l’humain est vertical sur un équilibre horizontal qui est celui du cheval.
Ce principe semble évident mais pourtant peu respecté dans son mouvement, car les pratiquants actuels ont, pour la plupart, peu conscience de leur corps et n’exercent malheureusement pas ou peu d’activité physique hors cadre équestre…

La tonicité, l’aisance, l’équilibre, la souplesse ainsi que le développement de la coordination, s’acquièrent dans le mouvement, donc dans la pratique de différents sports.
Quels qu’ils soient, la marche, la natation, la gymnastique tel que le pilates, les différents yogas, la danse, les arts martiaux, etc… du plus simple au plus complexe, du plus doux au plus endurant, selon les goûts, selon les personnalités, l’activité sportive développe toutes ces qualités physiques mais aussi les qualités psychiques tel que le courage, la persévérance, le dépassement de soi, l’endurance, l’écoute, l’altruisme, l’humilité ET l’ouverture d’esprit… (qui, on le rappelle, n’est pas une fracture du crâne!).

J’ai donc cherché (et continue à œuvrer) depuis plusieurs années, à accompagner mes élèves avec une pédagogie adaptée au couple cavalier/cheval (ainsi qu’à leur singularité), à transmettre des outils simples et pragmatiques afin d’améliorer l’équilibre et le ressenti du cavalier et par conséquence, celui du cheval, par l’économie des moyens.

Me nourrissant de mes propres expériences ainsi que d’incontournables littératures équestres où l’on décrit le travail de la position, j’ai pu relever que rien ne différenciait le corps de l’homme et celui de la femme…
Et pourtant! Les personnes qui détenaient les plus importants dysfonctionnements à cheval étaient bel et bien des femmes…
J’ai donc compris que l’enseignement contemporain n’avait pas pris en compte ce grand changement de public, car tous les écrits étaient rédigés par et pour des hommes (sauf quelques exceptions), et que les directives de la position étaient bien adaptées à une majorité d’hommes mais ne prenait pas en compte l’aspect anatomique du corps de la femme.

En effet, il est une évidence de décréter que le corps de la femme est tout en point différent de celui de l’homme, et pourtant, il me semble essentiel de rappeler que:
La femme est, de nature laxe, voire hyperlaxe, son pourcentage de masse musculaire est nettement inférieur à celui de l’homme, elle est sensible et d’humeur variable dû à des fluctuations hormonales, elle possède deux orifices péri-anales (contrairement à un seul pour l’homme) car elle détient le don d’enfanter…
(Attention les filles, ne vous méprenez pas sur mes propos qui restent uniquement scientifiques!)
Les différents placements du bassin de la femme sur un cheval (selon chaque morphotypes) auront donc une incidence plus importante que pour l’homme (par rapport à cette hyper mobilté), ainsi qu’une conséquence sur sa verticalisation dans le mouvement aux trois allures.
L’objectif de notre enseignement étant d’améliorer le fonctionnement de la posture en s’adaptant à chaque individu(e) et non de lui donner des directives qui entraveraient ce même fonctionnement!

Nous avons donc toutes subi cette position inadaptée, celle de descendre les talons en ouvrant les jambes et en fermant le bassin, de se tenir droite en se cambrant, de trotter enlevé en étant incapable de rester en suspension dans le temps enlevé, de pousser constamment notre cheval à grand coups d’assiette, de subir le trot des dos rebondissants, de précéder le mouvement du galop, d’avoir les mains qui bougent au trot à cause de nos bras tendus pour conserver les mains basses, d’accompagner le mouvement du balancier du cheval avec le bassin au lieu de le suivre avec les mains grâce à nos coudes fléchis et souples, de fonctionner sur l’arrière des ischions car c’était notre seule solution pour ne pas décoller les fesses, et la liste est loin d’être exhaustive…

Cette situation est encore très actuelle car après plus de 10 années d’observation et de recherche, je peux affirmer que cette instabilité engendre de lourdes conséquences biomécaniques (même si ce terme est très en vogue, c’est un fait!) du cavalier et de son cheval:
Pour les humains: maux de dos, douleurs, contractions musculaires, sciatiques, névralgies, hernies discales, ainsi que de multiples compensations corporelles suite à plusieurs années à cheval dans une mauvaise position…
Pour les équins:
Douleurs dorsales, buccales, névralgies, migraines, et j’en passe, engendrant également de nombreux problèmes de comportements ainsi que d’agacements de nos chères quadrupèdes qui se dissipent rapidement dès que la position du cavalier devient stable et confortable autant à pied qu’à cheval!

C’est donc pour cette raison qu’il est indispensable de se préoccuper tout d’abord de l’équilibre du cavalier, quels que soient ses objectifs ainsi que les moyens entrepris pour les atteindre…

En France, très particulièrement, nous aimons faire des classifications, alors nous allons chez des « spécialistes », soit de la posture, soit du comportement, soit du dressage etc, etc, etc…

Mais ce travail est une base essentielle, c’est une spécialité qui fait partie DES PILIERS de l’apprentissage et tous les enseignants doivent connaître un minimum les constitutions de leurs équitants, mais l’adaptation de la selle au cheval et à son cavalier, sans avoir peur d’exercer sur soi-même ce que l’on enseigne à nos élèves :

  • se faire longer en surfaix et tapis et /ou en selle, aux trois allures
  • monter en tapis de monte à cru
  • travailler sans harnachements avec ou sans la selle
  • sauter sans étriers ou sans selle
  • partir en trotting en suspension ou sans étrier en respectant son propre rythme,
  • se concentrer sur l’incidence de notre respiration dans l’utilisation de nos aides

Tout ceci nous donne de véritables solutions et indications, concrètes, claires, simples, pragmatiques qui éclairent nos élèves et leurs permettent de trouver une véritable stabilité à cheval qui fera grandement évoluer leur technique équestre!

En conclusion à ces réflexions, je dirai donc que le travail sur la posture du cavalier n’est, à mon sens, pas une spécialité, elle est la fondation principale pour accéder à la sécurité ainsi qu’à une véritable technicité équestre digne de ce nom!

 

Gina Pitti, à Montoison, le 5/10/2017.